mardi 3 novembre 2009

The Dark Knight (2008)


C'est une évidence de dire que le Joker est le personnage principal de Dark Knight. C'en est même le héros, là où Batman devient un vigilante qui met certains principes démocratiques en danger. Le Joker est un personnage atypique dans le film, mais aussi d'un point de vue narratif (le film comme les personnages ont du mal à le suivre [1]). On se rend compte que ses motivations échappent à celles d'un méchant lambda et le rendent imprévisible : l'argent n'a aucune prise sur lui (la montagne de billets qu'il brûle), tout autant que des motifs comme la vengeance ou le trauma : il raconte à chaque fois une histoire différente concernant ses cicatrices [2]. C'est bien son super-pouvoir, cette incapacité à suivre un schéma attendu, qui le rend victorieux. De fait, il peut être là où on ne l'attend pas, transformer une défaite (sa capture par Gordon et Batman) en victoire ("ça faisait partie de son plan" comprendra Gordon).
Or le coup de génie du film va suivre dans la séquence du duel entre Batman et le Joker, tout autant physique qu'idéologique. Ce dernier se retrouve suspendu par les pieds à un fil. Commence un dialogue champ/ contrechamp. Champ: Batman, à l'endroit. Contrechamp: Le Joker, à l'envers. Puis la caméra pivote sur son axe et le remet dans le bon sens. En retournant la caméra, Nolan nous donne à voir le monde à travers les yeux du Joker, ou plutôt il nous montre que le bon regard est celui du Joker car il s'adapte à lui, lui donne raison en le remettant, lui, dans le bon sens : il se tient droit, la tête vers le haut tandis que sa veste et les bâtiments en arrière-plan se dirigent vers le sol. Du coup, le monde à l'endroit que l'on connaît se révèle être un monde à l'envers. Le Joker voit que le monde est un monde insensé du coup. Un monde de fou. Le joker le sait. Il ne cherche qu'à le faire comprendre aux autres. En mettant la caméra à son niveau, le réalisateur lui donne raison. C'est la relativisation du mal par le recadrage.

1. Le braquage au début du film est à ce titre exemplaire, lequel est-il ?
2. À ce titre, Le Joker ressemble beaucoup à un personnage d'un film d'Hellman, GTO (Warren Oates) dans Two-Lane Blacktop. Un personnage perdu qui raconte à chaque autostoppeur son histoire personnelle... toujours différente.