dimanche 13 juillet 2008

Le Secret de la Planète des singes (Ted Post, 1970) : Tomber les masques


«
You… bloody… Bastard !» – Taylor au docteur Zaius

Le Secret de la planète des singes est la suite de La Planète des singes, qui comptera trois autres opus, et portera la saga à cinq films. Véritable tour de force, les films forment un ensemble très cohérent au nihilisme surprenant, qui jamais ne dénatureront le premier volet. Résumé : À la fin de La Planète des singes, Taylor découvre qu’il est sur Terre, 2000 ans dans le futur, où les singes règnent sur les humains. Mais dans Le Secret de la planète des singes, il découvre que des humains intelligents ont survécu. Vivants reclus, les nouveaux humains ont développé leurs capacités cérébrales et sont doués de télépathie. Totalement lisses (imberbes) et ne manifestant aucunes émotions, à l’opposé des singes, ils sont l’espoir de l’humanité. À première vue…
Car une idée de génie transparaît dans le film : nos descendants, aux visages si humains s’arrachent la figure, qui s’averrait n’être qu’un masque. Et derrière se cachent des faciès de mutant décharnés, victimes des radiations de la Bombe à laquelle ils vouent un culte.
Alors que les effets spéciaux, pour bien fonctionner, doivent être les plus discrets possibles, il y a ici une prise en compte de leur supercherie. Car de ce fait, les masques évoquent directement l’utilisation des maquillages pour la réalisation du film : non seulement les singes, mais les humains aussi sont interprétés par des acteurs déguisés (masques de mutants sous la peau). Ce que cela nous dit ? Que les humains du film sont considérés comme des créatures aussi étrangères que les singes, car il faut se transformer pour leur ressembler (c’est ce que tente les nouveaux hommes qui cachent leur défiguration). Mieux même, puisque pour jouer les singes, les acteurs portent des masques aux traits simiesques alors que ceux qui interprètent les humains jouent à visages découverts sauf que, dans le film, le réalisateur fait passer ces vrais visages pour des masques.
C’est une des très grandes forces de ce second opus, utiliser un outil, le trucage de cinéma, comme forme de métadiscours pour nous dire qu’il faut surtout se méfier des apparences. Car dans la saga de La Planète des singes, ce n’est pas tant les singes qui sont la menace que le comportement d’une civilisation humaine qui vit dans la peur de l’Autre. C’est ça, et non pas les singes, qui la conduira à sa perte. Par ce procédé, le réalisateur renvoie les hommes aux singes qui, comme le décidera Taylor, ne méritent, ni les uns, ni les autres – à quelques fragiles exceptions (Zira, Cornelius, Armando, McDonald) – de vivre.

KC

Le démasquage d'un des nouveaux humains